Histoire de Beaurecueil

Petit village discret au pied de la montagne Sainte-Victoire, Beaurecueil est riche d’histoires et de patrimoines : gisement d’œufs de dinosaures, vestiges romains de la via Aurelia, fontaines, oratoires, église, château et bien d’autres. Le territoire de Beaurecueil a été pendant longtemps dépendant de la seigneurie du Tholonet avant que celui-ci ne fut érigé à son tour en seigneurie en 1570. Claude Decormis, avocat général du Roi, devint alors le premier seigneur de Beaurecueil. Ce sont d’ailleurs les armoiries de la famille que l’on retrouve dans le blason de la commune.

L’étymologie même du nom de Beaurecueil rappelle la présence romaine sur notre territoire et invite à la flânerie. Ainsi, Bellus recessus est le lieu où il fait bon vivre, le bon refuge, le charmant recoin.

Les terres de Beaurecueil étaient occupée à l’époque romaine par des villae. Ce sont de grands complexes agricoles avec plusieurs corps de bâtiments. Dans les espaces agricoles actuels, ou sous des édifices plus récents, il n’est pas rare de trouver ça et là des vestiges des bâtiments romains, des tegulae, des céramiques et des amphores. Depuis la fondation d’Aix-en-Provence en 123 av.n.è, point de départ de ce qui sera appelé plus tard « la Conquête de la Gaule », les romains occupent de plus en plus le territoire.

Sur la commune de Beaurecueil, outre les villae, on retrouve des vestiges de l’aqueduc romain de Saint-Antonin sur Bayon qui alimentait Aix-en-Provence. Ainsi, le long de la route Cezanne se dévoilent les vestiges du canal, des piliers d’un pont et des maçonneries.

Vestige d’un des piliers de l’aqueduc romain passant à Beaurecueil et alimentant Aix-en-Provence

Enfin, dans le bois des Roussettes, des traces d’ornières sont visibles et sont les témoins du passage de l’antique Via Aurelia, la voie Aurélienne. Elle était la voie principale de la Pronvincia Romana. Elle partait de Rome et reliait l’Espagne en passant par Aix-en-Provence, Arles, etc. C’est la voie qui contournait le bassin méditerranéen par le Nord.

L’histoire du fief

beaurecueil

Vue sur le château de Beaurecueil et son parc au pied de Sainte-Victoire / Crédit photo A.C

On ne sait pas ce qu’est devenu Beaurecueil à l’époque médiévale, après les villae romaines. Plusieurs centaines d’années d’une période obscure se succèdent. Cependant, nous savons que les terres de Beaurecueil dépendaient au XIIe siècle de la commanderie templière de Bayle, sur le plateau du Cengle, à Saint-Antonin-sur-Bayon. Il s’agit d’ailleurs de la première commanderie en Provence, fondée en 1143. Avant, ces terres appartenaient aux moines défricheurs de l’abbaye de Saint-Victor à Marseille, et ceci depuis 1064.

La date clé dans l’histoire du village est celle de 1548. C’est lorsque le seigneur du Tholonet, Balthazard de Jarente, donne à M. Pierre Decormis, avocat à Aix-en-Provence, la « terre sous le Cengle » et la bastide à bail emphytéotique. Pierre Decormis obtient cet honneur probablement en remerciement de quelques procès démêlés en faveur de Blathazard de Jarente…

C’est son fils Claude qui sera érigé en seigneur en 1570. Il sera donc le premier seigneur de Beaurecueil. Un territoire qui reste toutefois dépendant du seigneur du Tholonet, celui-ci gardant son droit de prélation (droit de retrait réservé au seigneur majeur pour l’acquisition d’une terre noble en remboursant l’acquéreur).

Du château primitif au château du XVIIIe

La première demeure

Blason Beaurecueil C’est en 1572 que Claude Decormis, avocat général du Roi, magistrat, et premier seigneur de Beaurecueil, fit construire son château en lieu et place des vestiges d’une bastide aux salles voûtées. Ce château primitif mesurait 24 mètres de long sur 11 mètres de large et possédait au bout du bâtiment une tour carrée de 2,50 mètres de côté – servant de cage d’escalier – qui desservait le 1er étage de la bastide, occupé par le grenier. Le colombier se trouvait aussi dans la tour.

Entre 1574 et 1575 d’autres travaux furent réalisés. Un mur d’enceinte de 3 mètres de hauteur et de 50cm de largeur est ajouté et entoure la bastide. Ce mur est toujours visible sur une bonne partie actuellement, même s’il est moins haut qu’à l’origine.

Une fontaine est construite devant la bastide pour recueillir les eaux. Elle était ornée de deux lions garnis d’un canon de fer chacun. Les lions rappelant les armes des Decormis « D’azur à deux lions affrontés d’or soutenant un cœur d’argent« , et qui servent de blason au village.

En 1586 est ajouté une seconde tour dans l’angle nord pour accueillir le four banal. Au Moyen Age et sous l’Ancien Régime, les habitants avaient pour obligation d’utiliser les installations seigneuriales pour moudre le grain, cuire le pain ou encore puiser l’eau. Cela donnait lieu à un impôt en argent ou en nature appelé « banalité ». Pour le pain, ils devaient utiliser le four seigneurial dit « banal » et payer un droit de « fournage ». C’est-à-dire, remettre une partie de leur production au seigneur, en général, un pain sur vingt ou sur trente. C’était un asservissement tant le four à pain était indispensable à la vie quotidienne. En contrepartie, le propriétaire avait pour devoir d’entretenir son four et d’y installer un fournier (boulanger) qui était chargé de cuire le pain et de prélever l’impôt.

Le château de plaisance

Par la suite, Louis Decormis, petit fils de Claude Decormis, marquis de Brégançon, seigneur de Beaurecreuil, Roques-Hautes et Fabrégues, entreprend des travaux pour améliorer le modeste château de ses ancêtres, dont l’apparence restera inchangée jusqu’en 1853.

Dès 1654, les agrandissements se succèdent : la porte d’entrée est déplacée, la tour carrée est transformée en prison, une avancée flanquée de deux hautes tours est ajoutée (elle est toujours visible aujourd’hui). La plus haute tour accueillera le nouveau colombier. Celui-ci est un privilège du seigneur haut justicier et est réservé à la noblesse et au clergé. Le terme de « pigeonnier » date du XIXe, car après la révolution française et la fin des droits seigneuriaux, le pigeonnier devient la partie emblématique de l’habitat paysan.

À la mort de Louis, c’est son fils ainé Pierre III qui hérita du domaine et le transmis à son fils unique Claude II, qui ne fut jamais marié et n’eut aucun hérité direct. Il vendit le fief à Antoine de Laugier, chevalier de l’ordre de Saint-Michel et Subdélégué Général de l’Intendance en Provence, en 1715. Le petit-fils François Joachim Serge de Laugier, suite au décès de son fils unique, vendit les terres à Pierre Joseph Aillaud en 1777, qui ne les garda pas longtemps. En effet, le marquis de Gallifet, seigneur du Tholonet, exerça son droit de prélation.

À la Révolution Française, le marquis en fuite, ses biens furent réquisitionnés et vendus à plusieurs citoyens d’Aix.

Cela peut paraître incongrue, mais il y avait bien une « prison » pour enfant (jusqu’à l’âge de 21 ans) dans ce petit village au XIXe siècle ! Elle était dirigée par l’abbé Charles Fissiaux qui n’en était pas à son premier essai. Cet établissement avait pour vocation de remettre les enfants ayant commis des crimes dans le droit chemin. Pour cela, ils n’étaient pas simplement enfermés entre 4 murs, loin de là. Cette colonie a été créée pour leur apprendre le métier d’agriculteur. Les enfants avaient donc un emploi du temps chargé, entre travail dans les champs, lecture et divers apprentissages.

L’abbé Fissiaux étant un fin agronome toujours en quête du meilleur, il faisait apprendre à ses pensionnaires les nouvelles techniques d’agriculture. Il est l’un des premiers, par exemple, à avoir introduit la machine à vapeur pour labourer et faucher en Provence ! Avec ses « prisonniers » d’un nouveau genre, il remit en état les terres inoccupées du village et remirent en état le système d’irrigation, en l’augmentant et l’améliorant, des seigneurs Decormis. L’un des plus grands bassins, le « Béal » fût  nettoyé et agrandi à cette occasion.

La réussite du lieu fût exemplaire et la colonie sorti bon nombre de ses pensionnaires « prisonniers » de la misère car à leur sortie, ils avaient appris un métier, savaient lire et disposaient de quelques sous pour pouvoir subvenir à leur premier besoin. Beaucoup trouvèrent un emploi car la colonie agricole pénitencière de Beaurecueil était connue dans toute la région pour son travail de très grande qualité.

Cet établissement qui avait pour objectif de sortir les enfants délinquants des prisons pour adulte resta ouvert pendant presque 30 ans avant d’être fermé en 1880. Quelques années plus tard, un orphelinat ouvrira avec la même vocation. Cependant, cela ne durera pas longtemps et le château sera racheté par M. Save au début du XXe siècle. Il n’était autre que… le mari de Mme. Decormis, descendante des Decormis de Beaurecueil.

La ferme a été restaurée il y a quelques années et abrite aujourd’hui, la salle municipale, les bureaux du Grand Site Sainte-Victoire ainsi que la Table de Beaurecueil.

Oratoire Notre Dame dit de l’Ubac au bord de la Route Cezanne

Sur les bords des routes se trouvent des petits édifices qui témoignent de l’art populaire qui s’exprime dans l’expression religieuse. Ils mettent une note de spiritualité dans la nature et témoignent de l’exigence métaphysique de la condition humaine. Pour se concilier les forces de la nature, pour se protéger des animaux sauvages, pour assurer la fécondité des femmes et la fertilité de la terre, à la suite d’un vœu ou d’un remerciement, pour une guérison ou pour la commémoration d’un grand évènement, les hommes ont élevé des lieux de culte et de vénération.

Oratoire Saint-Mitre datant de 1849 au bord de la Route vers Châteauneuf-le-Rouge

Le christianisme a peuplé les routes, les chemins, les carrefours, les lisières des champs, d’oratoires, de croix et de sanctuaires devant lesquels on vient prier pour demander protection et bénédiction. On vient seul, pour une prière ou bien en pèlerinage pour commémorer une fête, suivre une mission apostolique, célébrer un rite corporatif ou le souvenir d’une intervention miraculeuse en récitant le chapelet ou entonnant des litanies.

Jusqu’au XIXe siècle, on organisait des processions pour attirer sur les récoltes la protection du saint auquel l’oratoire était dédié, pour qu’il protège les bêtes ou anéantisse les …processions de chenilles.

Sur notre territoire, on rencontre un bon nombre de ces chemins à souvenirs qui, comme d’autres vestiges, font partie de notre patrimoine.

Oratoire Saint-Benoît Joseph Labre datant de 1896 en retrait de l’avenue Sylvain Gautier, au bord du chemin montant vers la colline.

Fontaine à Beaurecueil

** En cours de rédaction **

Fissiaux, étude biographique – M. l’abbé PAYAN d’AUGERY Auguste – 1886

Histoire de Beaurecueil. Des origines au début du XIXe siècle – SILVESTRE, Louis

Beaurecueil. Une petite commune du pays d’Aix et son histoire  – GANNE, Jean – 1999

La ferme de Beaurecueil ou « un pénitencier à l’ombre de Sainte-Victoire » – JULIEN, Émile Atelier des Livres, 2013

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